Que devient Rabah Gamouh depuis qu’il a pris sa retraite de footballeur?

Rabah Gamouh : Je suis à la maison à Nîmes. Je me suis reconverti dans la pétanque (rires). Après ma carrière, j’ai entrainé des jeunes et des adultes dans mon quartier. C’était beaucoup de travail. J’ai arrêté par la suite car physiquement, c’était dur. 

Est-ce que vous continuez à toucher un peu le ballon ?

Non. Je ne peux plus parce que j’ai un peu d’arthrose. Je suis devenu un pépé.  

Après l’indépendance, vous avez été un des premiers footballeurs à avoir tenté l’aventure à l’étranger. Pouvez-vous nous expliquer dans quelles circonstances vous avez débarqué en France ?

J’étais en vacances en France à Avignon, avec deux coéquipiers, chez le frère de mon entraineur Zekri. Mes collègues sont repartis à la fin de leur séjour. J’ai décidé de rester une semaine de plus. La personne qui me logeait m’a alors proposé de faire un essai. Son patron a contacté le Président du Nîmes Olympique qui a répondu positivement. J’ai fait un match amical. Ils m’ont dit de rester. J’ai accepté. C’est comme cela que je suis resté en France.  

Il y avait un souci à l’époque puisque le joueur algérien ne pouvait pas quitter le pays avant ses 28 ans.

Je devais faire mon premier match à Laval. Je commençais à me préparer pour aller à l’échauffement quand mes dirigeants m’ont informé que la fédération algérienne m’avait bloqué. Je suis resté un an sans jouer. J’ai alors saisi la FIFA qui m’a autorisé à reprendre une licence l’année d’après.  

Votre arrivée en France se situe une vingtaine d’années environ après la fin de la guerre d’Algérie. Avez-vous ressenti du racisme dans le football ?

Je n’ai jamais connu ce problème. Au contraire, j’ai été bien accueilli à Nîmes. Je me suis aussi rapidement adapté. 

Pourtant Nîmes, c’est le département du Gard où il y a beaucoup de rapatriés d’Algérie. 

Il y a effectivement beaucoup de « pieds noirs ». Je n’ai pas eu à me plaindre. Les Nîmois sont des gens magnifiques. Je joue souvent à la pétanque avec des Français. Je n’ai jamais eu de problème. 

Sur le terrain vous étiez connu pour être un vrai feu-follet. Avez-vous le souvenir d’avoir fait souffrir les défenses adverses ?

Un jour nous recevions le FC Nantes à Nîmes. C’était mon premier match avec les Nîmois. Il y avait en face le défenseur Maxime Bossis. Je l’ai « banané ». Je l’ai rendu fou. Il était grand et moi petit, vif, rapide. Il y avait aussi un joueur de Marseille qui m’a dit une fois : « Il ne faut plus recommencer ce que tu me fais. Tu passes, et puis c’est tout ». Cela m’a fait rigoler. Je lui ai répondu que j’étais obligé de le faire pour passer (rires). 

Nimes, c’est aussi Kader Firoud. Quel type d’entraineur était-ce ?

Oui, il m’a entrainé. C’était un meneur d’hommes. Il était rude. Le boulot était dur avec lui. C’était un homme qui connaissait le foot. Quand on le contredisait, il n’aimait pas trop. Il aimait imposer sa griffe. Il fallait faire ce qu’il voulait sur le terrain. Si on ne le faisait pas on se prenait des soufflantes à la mi-temps. 

Comment cela se passait dans les vestiaires ?

Il criait. Il lui arrivait de frapper les joueurs. Ils prenaient des gifles. Parfois, je n’allais pas dans les vestiaires. Je me sauvais. Je me planquais dans les toilettes. En revanche, avec les jeunes il n’était pas comme cela. Certains jouaient avec la peur et rataient leur match. Il leur disait seulement de prouver leurs salaires. 

Est-ce que des joueurs se sont déjà rebellés contre le coach ?

Personne. C’était lui le patron. Aucun dirigeant, ni même le président ne s’en mêlaient. Il avait carte blanche. C’était un gagneur. Il avait de grosses colères. Il ne fallait pas trop le chercher. Il lui est même arrivé de s’en prendre à un supporter à travers le grillage. On devait perdre ce jour-là. Je ne sais pas ce qu’il lui a dit mais il l’a frappé. En match, il était dans sa bulle. Il nous arrivait quand même de rigoler aux entrainements ou à l’hôtel.  

Quels types d’entrainement vous dispensait-il ?

C’était très très dur. C’était physique pendant une heure et demi ou deux heures. Il fallait aller jusqu’au bout. C’était bénéfique pour nous car en compétition cela payait. 

On dit qu’il a su apporter de nouvelles méthodes de management pour l’époque. Quelles étaient-elles ?

Il mettait de la rigueur, de l’engagement physique. Il y avait le feu à Nîmes. On ne venait pas gagner comme cela. Il nous arrivait aussi de pratiquer du beau football. 

Le Nîmes Olympique est encore à son image : une équipe combative, hargneuse. N’est-ce pas ?

Exactement. Il a laissé son empreinte. Au club, ils lui sont toujours reconnaissants.

 

Entretien réalisé par Nasser Mabrouk (http://www.dzairworld.com/) 09/05/202010

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Stanislas Golinski
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Stanilas Golinski quand il avait 80 ans, toujours fidèle à Nîmes
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