Pour la première fois depuis le derby perdu à Montpellier le 30 septembre, Moustapha Diallo sort de son silence, et évoque avec sincérité et émotions sa blessure à la cheville, qui a 32 ans, l'empêche de continuer le football.

Poignant. Jamais, depuis le derby perdu à Montpellier le 30 septembre (3-0) qui restera comme le dernier match de sa carrière professionnelle, Moustapha Diallo ne s’était exprimé. "Je ne voulais pas inquiéter ma mère, qui est au Sénégal et qui me suit. Vous savez comment c’est, les mamans… ", nous confie-t-il. Il l’a fait en exclusivité pour Midi Libre, la semaine passée. Avec une sincérité désarmante. Et émouvante.

La question classique, d’abord : comment ça va ?

Ce matin (mardi dernier), j’ai eu envie de toucher un peu le ballon, ça m’a fait du bien. Car sinon, c’est très dur au quotidien, de suivre les soins, de ne faire que ça. Heureusement, quand je vois mes coéquipiers rigoler, cette bonne ambiance au sein de l’équipe, ça me réconforte.

C’est quoi, aujourd’hui, votre semaine type ?

Du lundi au vendredi, je viens au centre d’entraînement de la Bastide, vers 9 h 45 - 10 heures, et je passe entre les mains des kinés, Antho (Lombardo), Eliott (Fluckinger) ou Alain (Ratat), qui prennent soin de moi. J’essaie de venir quand l’entraînement commence, pour ne pas déranger les joueurs avant ou après les séances.C’est ma routine, je fais toujours les mêmes choses. Parfois, je les rejoins sur la pelouse, je parle avec eux, avec les coaches, mais je ressors vite car j’ai la chair de poule. C’est très dur. J’aimerais tant aller au combat avec eux.

Vous sentez-vous coupable, quelque part ?

Non. Ce serait le cas si je pouvais faire et que je ne faisais pas.Mais là, je ne peux pas faire. J’ai tout essayé. Je ne me sens pas coupable, mais déçu de ne pas pouvoir apporter quelque chose à cette équipe. Mais ça me soulage de voir qu’elle a de bons résultats.

Avec Guingamp, vous aviez mal à votre cheville gauche mais vous arriviez à jouer. Que s’est-il passé ces derniers mois ?

Les premiers mois avec Nîmes, j’ai eu plus de douleurs qu’avant. J’ai pris un coup dessus à Angers (4-3) lors de la 1e journée.J’ai subi une première infiltration, qui m’a fait du bien, et j’ai réussi à faire un bon match contre l’OM (3-1, une passe décisive pour Bouanga, 2e j.). Mais après, je ne suis plus arrivé à enchaîner les entraînements… Après le match contre Guingamp (7e j.), un mercredi, je n’arrivais plus à marcher jusqu’à ma voiture. J’ai pris deux Voltarène (un anti-inflammatoire, NDLR), je tremblais. Alors qu’avant, à Guingamp, le Voltarène me soulageait toujours. Le dimanche, je joue à Montpellier (8e j.). À la mi-temps, je m’assois dans le vestiaire. Le coach parle, il annonce que Denis (Bouanga) sort et que Théo (Valls) va rentrer. Je me lève pour retourner sur le terrain, mais je n’arrive pas à marcher. Je regarde ma cheville : elle a gonflé. Je dis au coach que je ne peux pas continuer, et que c’est moi qu’il doit remplacer.

Comment pourriez-vous décrire votre douleur ?

C’est une douleur qui me fatigue dans la tête. La douleur me domine. Elle me prend toute mon énergie. J’ai fait trois infiltrations, des PRP (injections de plasma riche en plaquettes, pour accélérer une cicatrisation, NDLR), mais j’avais toujours la même douleur. Et plus j’essayais, plus j’avais mal. J’ai consulté le chirurgien Mares à Nîmes, puis j’ai pris un deuxième avis à Marseille : les deux docteurs m’ont dit que jouer allait aggraver la situation. La cheville est abîmée, elle n’a plus de cartilage.Ils m’ont parlé de prothèse, mais je suis encore jeune…

Quand vous êtes-vous dit que vous ne pourriez plus jouer au haut niveau ?

Quand après m’être arrêté en octobre, être allé me ressourcer au Sénégal, je suis revenu à Nîmes, j’ai fait un footing, puis une séance un peu plus soutenue, et que la même douleur est revenue. Alors que je n’avais rien fait depuis un mois. Là, je me suis dit : “Ça va être compliqué”…

Vous avez toujours été bon quand vous avez joué avec Nîmes. L’équipe fait une superbe saison. Ce doit être d’autant plus dur à vivre…

Je suis allé à la limite, je me suis toujours surpassé pour pouvoir jouer. C’est comme ça. Il faut l’accepter. On a tout tenté. Je crois en Dieu, et je le remercie de m’avoir fait vivre dix bonnes saisons comme footballeur professionnel (Bruges, Ferrol, Guingamp, Nîmes, NDLR). Ca aurait été plus dur à vivre si l’équipe ne gagnait pas. Là, ma blessure a permis de faire découvrir d’autres jeunes, Théo (Valls), Antonin (Bobichon). Quand je suis arrivé, j’ai tout de suite dit au staff : “Vous avez une bonne équipe”.

Parce qu’elle fait de tels efforts, elle met un tel rythme et une telle intensité que cela met en difficulté nos adversaires. Alors, oui, c’est frustrant, parce que j’avais les qualités pour l’aider. J’aurais marqué dans cette équipe, sur les coups de pied arrêté de Teji (Savanier), les centres et les débordements de Denis (Bouanga) ou Sada (Thioub). Mais je ne veux plus rêver…

Vous sentez-vous Croco, malgré tout, malgré le fait que vous ayez peu joué avec Nîmes ?

 

Oui, je me sens Croco. Obligé. Je suis au quotidien avec mes coéquipiers. Ce sont de vrais mecs avec moi. Ils me respectent. Et moi, je prends du plaisir à les regarder jouer, s’entraîner, j’en profite au max. Ils arrivent presque à me faire oublier ma blessure. ERIC DELANZY

De Nîmes au Sénégal

 

La femme, la fille et le fils de Moustapha Diallo vivent au Sénégal. "Je devais partir en Turquie avant de signer à Nîmes. Je ne savais pas trop comment ça allait se passer pour mes enfants là-bas, alors on les a inscrits à l’école française au Sénégal. Je vais y retourner en fin de saison, me ressourcer, réfléchir à la suite, explique l’international (4 sélections). J’y suis allé trop peu ces dernières années. Pour Nîmes, mon dossier d’inaptitude à la pratique du football de haut niveau avance. Je ne sais pas ce que je vais faire après. Mais je voudrais remercier Laurent Boissier (le directeur sportif de Nîmes), qui m’a recruté et m’a toujours soutenu". Une fois l’inaptitude reconnue, la deuxième année de contrat du Sénégalais, qui aura 33 ans en mai, sera résiliée de fait. Après 250 matches en professionnel.

Il est déjà de retour ! Non conservé par En Avant, Moustapha Diallo (32 ans) s'est engagé pour deux saisons avec le Nîmes Olympique qui vient justement visiter Guingamp, samedi, à Ploufragan. Un retour forcément teinté d'émotion pour le grand Sénégalais. 

Comment allez-vous ? 
Ça va. Les premiers jours, ça m'a fait tout bizarre d'être ici, dans un nouveau club, après neuf saisons passées à Guingamp. Mais je commence à prendre mes repères. J'attends de trouver une maison pour que ma famille me rejoigne. Le seul souci, c'est qu'il fait très chaud. La chaleur m'a un peu gêné au début. Mais, là aussi, je commence à m'adapter.
Racontez-nous votre arrivée à Nîmes ? 
Au départ, je devais aller en Turquie, à Konyaspor. J'avais quitté le Sénégal pour signer mon contrat mais, au dernier moment, ça ne s'est pas fait. C'est alors que Nîmes s'est manifesté.
Vous vous êtes donc fait à l'idée de jouer en Ligue 1 ailleurs qu'à Guingamp... 
C'est le football ! J'ai toujours dit que j'aurais préféré finir ma carrière à Guingamp. J'y ai tout connu : le National, la Ligue 1 pendant cinq ans, la Ligue Euro
pa... Ce club m'a tout donné et je lui ai tout donné en retour. Mais avec Nîmes, j'ai trouvé un nouveau challenge. 
Comment jugez-vous ces premières semaines au Nîmes Olympique ? 
On a fait une bonne préparation. Pour l'instant, on n'a perdu aucun de nos matchs amicaux (3 victoires, 2 nuls) : c'est bien, ça donne de la confiance. L'équipe est jeune, beaucoup ne connaissent pas la Ligue 1. Mais il y a de la qualité et de bons joueurs. De toute façon, on le sait, pour se maintenir, il va falloir se battre. Mais, ça, je connais !

 

Mercredi soir, vous avez inscrit le but décisif contre la sélection de l'UNFP (2-1). De quelle manière ?
À la Mouss Diallo, de la tête, à la réception d'un centre (rire) ! Mon corps supporte de mieux en mieux la chaleur, je commence à trouver des automatismes avec mes partenaires. Je suis prêt à aller à la guerre !
Quel a été le discours de Bernard Blaquart, votre nouvel entraîneur ?
C'est quelqu'un de calme et de précis. Il aime le jeu. Évidemment, il attend de moi que j'apporte toute mon expérience. J'espère que ça va bien se passer.
Ce samedi, vous affrontez déjà Guingamp. À quel accueil vous attendez-vous ? 
C'est d'abord un plaisir de retrouver mon ancien club. Je vais revoir des amis, retrouver les supporters. Ce sera peut-être émouvant, je ne sais pas. De mon côté, je resterai naturel, quoi qu'il se passe. Y compris sur le terrain. Avant et après le match, on pourra rigoler mais, sur le terrain, chacun défendra ses couleurs, c'est normal. Et si je dois tacler, je taclerai !
© Le Télégramme 

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Stanislas Golinski
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Stanilas Golinski quand il avait 80 ans, toujours fidèle à Nîmes
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