Après avoir éliminé Marseille en 32e de finale de la coupe de France 1970, les Crocodiles affrontaient l’ASSE, la meilleure équipe française du moment. Une rencontre au sommet qui a fait chavirer les supporters nîmois.

Sacha Distel a eu la main lourde pour les Nîmois. Le 6 mars 1970, c’est le chanteur qui est chargé d’effectuer le tirage au sort des huitième de finale de la 53e coupe de France de football. Après avoir créé la sensation en 32e de finale en éliminant l’OM (1-0, à Alès), les Crocodiles ont facilement écarté Poitiers (D3, 7-0), et les voilà parmi les 16 rescapés.

Mais l’artiste qui, en cette année 1970 cartonne avec son tube « Toute la pluie tombe sur moi », va sortir la boule Saint-Etienne après celle du Nîmes Olympique.

C’est le pire adversaire que les hommes de Kader Firoud pouvaient affronter. En effet, les Verts survolent le football français. Ils ont décroché les trois précédents championnats, et ils vont facilement remporter l’exercice en cours.  Avant de venir à Nîmes, les joueurs d'Albert Batteux sont déjà pratiquement champions, et n’ont perdu qu’une fois (à Rennes 1-0).

Autant dire que la tâche ne s’annonce pas facile, surtout qu’à partir des huitièmes de finale, les tours de coupe se jouent en matches aller et retour. Au bar de l’Industrie (siège du club), les Nîmois attendent fébrilement le coup de téléphone qui leur annoncera leur adversaire. Et quand Kader Firoud, l'entraîneur des Crocos l’apprend, il reste philosophe : « nous aurions pu prendre Baume-les-Dames ou Le Mans, que voulez-vous, c’est ça la coupe, c’est ce qui fait son succès » (Le Méridional du 7 mars 1970). Dès lors, c’est le grand rush pour trouver une place, et Paul Calabro, le président nîmois, se lamente : « si nous avions un stade plus grand, nous pourrions satisfaire plus de monde » (Le Méridional du 7 mars 1970). C’est le grand événement sportif de l'année à Nîmes et dans sa région.

La rencontre s’annonce comme l’opposition de deux des meilleures attaques de D1, mais également des deux meilleurs buteurs du championnat de France : le Nîmois Adolf Scherer, et le Stéphanois Hervé Revelli qui ont tous les deux 16 buts à leur actif.

Arrive enfin le jour tant attendu. Dès 13h30, ce dimanche 22 mars, la circulation des camions est interdite dans les rues Jean Bouin, Jules Verne et Pitot.

29e minute, Martinelli détourne le penalty de Revelli, c'est le tournant du match (fonds Collignon - Archives municipales de Nîmes)

En lever de rideau de ce choc, les spectateurs assistent à un match opposant les Cadets Nîmois à leurs homologues de Bagnols-sur Cèze. Le stade Jean-Bouin est plein à craquer. Le fameux round d’observation n’a pas lieu. Dès la septième minute, l’antre des Crocodiles exulte. À la suite du coup-franc tiré par Mezy, une tête de Marcellin propulse le ballon dans les filets de Carnus. Nîmes ouvre le score, et la joie de ses supporters est à son paroxysme. Il faut maintenant résister, serrer les coudes, faire le dos rond, et rendre les coups. À défaut d’impressionner l’adversaire, il faut acquérir son respect.

L’ambiance se dégrade quand le Stéphanois Keita met un violent coup de pied au Nîmois Canetti. Les tribunes grondent, et invectivent Roger Rocher, le président des Verts, assis sur le banc de touche.

Les Crocodiles poussent, et un Stéphanois fait une main dans sa surface de réparation, que monsieur Machin (ça ne s’invente pas) n’a pas vue, tout comme la faute identique du Nîmois Betton quelques minutes plus tôt. C’est aussi avec la main que Kabile sauve son équipe à la 29e minute, mais cette fois, sous l’œil attentif de l'arbitre. Revelli tire le penalty, mais Martinelli le détourne sur le poteau. C'est probablement le tournant de la rencontre.

Peu avant la pause, Scherer lance Marcellin qui part au but, mais le juge de touche signale un hors-jeu très discuté par les Nîmois. Le pesage hurle sa colère. La seconde période est moins emballante, car les deux équipes ont beaucoup donné. L’ASSE aura sa chance par Keita puis Revelli (46e) et Nîmes par Diongue (77e), mais plus rien n’est marqué. En l’espace de cinq semaines, les Crocodiles viennent de battre les trois meilleures équipes françaises (Marseille 1-0, Bordeaux 3-0 et Saint-Etienne 1-0). A l'issue du match, fort de ce succès, Kader Firoud est optimiste : « On les a étouffés, et pour le match retour, je suis bien sûr confiant ».

La suite ne lui donnera pas raison. Une défaite nîmoise 2-1 au match retour pousse les deux équipes à jouer la belle sur terrain neutre. Cette dernière se dispute dans des conditions dantesques, sous la neige et dans un Parc des Prince en construction. Le public parisien, sevré de football, envahit le stade. Ils sont 35 000 pour 18 000 places, et dans la cohue, certains sont blessés. Les Verts s’imposent 2-0, et se qualifient pour les quart-de-finale, mais c’est une autre histoire.

Norman Jardin

22 mars 1970. 8e de finale de la coupe de France.

Nîmes Olympique – Association Sportive de Saint-Etienne 1-0. Mi-temps : 1-0.

Stade : Jean-Bouin. Spectateurs : 13 848 (recette 323 858 francs). Arbitre : M. Machin. But : Marcellin (7e). Temps gris mais assez doux et pelouse sèche.

Nîmes : Martinelli – Garnier, Betton, Auge, Kabile – Canetti, Mezy – Marcellin, Scherer, Diongue, Bonnet. Entraîneur : Kader Firoud. 

Saint-Etienne : Carnus – Durkovic, Mitoraj, Bosquier, Polny – Broissart, Jacquet – Parizon, H. Revelli, Keita, Beretta. Entraîneur : Albert Batteux.

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Stanislas Golinski
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Stanilas Golinski quand il avait 80 ans, toujours fidèle à Nîmes
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