FOOTBALL : QUAND L’ÉPOPÉE DE QUEVILLY RANIME LA FLAMME À NÎMES…

Souvenez-vous du 4 mai de l’année 1996… Et de la finale de Coupe de France de football. Eux s’en souviennent d’autant mieux qu’ils en étaient les héros principaux. Les Ramdane, Ecker, Belbey and Co. composaient l’équipe historique du Nîmes Olympique qui rencontrait Auxerre, au Parc des Princes, champions de France la même année.

L’exploit n’a malheureusement pas eu lieu, puisque, menés à la mi-temps, les joueurs de Guy Roux l’ont finalement emporté 2 buts à 1, à la 88e minute, grâce à Lilian Laslandes, après un but de Belbey (25e pour Nîmes) et de Laurent Blanc (52e).

La rédaction d’Objectif Gard a voulu se remémorer cette finale au scénario « Hitchcockien », avec une partie des Crocos de l’époque, Pierre Barlaguet, l’entraîneur, en tête, mais aussi, l’ensemble de cette épopée fantastique, alors que le petit club Haut-Normand, L’U.S. Quevilly, joue, SA finale de coupe ce samedi soir, au stade de France (à 20h30).

Pierre Barlaguet, l’ex-entraineur nous confie qu’il aimerait se retrouver aujourd’hui, à la place de Régis Brouard (entraineur de Quevilly), qui a d’ailleurs entraîné Nîmes entre 1999 et 2001 (en D2) tant les souvenirs sont encore présents pour l’ancien coach aujourd’hui âgé d’un peu plus de 80 ans. Son inquiétude pour l’équipe normande, comme pour son équipe en 1996 : « le classement en championnat de National. On avait laissé des forces dans la Coupe. Les joueurs étaient très motivés de jouer Auxerre et moins des équipes comme Luzenac aujourd’hui, pour faire un parallèle, sauf le respect pour ce club ».

L’ex-coach rappelle que les lois des séries existent aussi parfois : « moi j’avais déjà participé à deux finales en tant que joueur (avec Nîmes) en 1958 et en 1961, toutes les deux perdues. Et mes ex-joueurs doivent se souvenir comme moi de la finale face à Auxerre. De mon côté en tant qu’entraineur, je ne peux que me souvenir parfaitement de ce moment rare où l’on rencontrait l’équipe d’Auxerre, future championne de France. Après la finale, je me souviens même que Guy Roux m’avait invité à venir assister à l’Abbé-des-Champs à Auxerre-Metz. Les Auxerrois venaient d’être sacrés champions ».

Dans le déroulement du match, Pierre Barlaguet se remémore sa causerie à la mi-temps : « le premier mot que j’ai dit, « le plus dur reste à faire ». Dans la semaine nous avions joué un match, la fin de saison approchant, la fatigue à gérer… J’étai inquiet. Je ne me suis pas trompé ». Au sujet de la demi-finale face à Montpellier : « c’était un derby. Ce match est celui qui a marqué. Il fallait s’accrocher. Faire preuve de hargne, de motivation, au-delà de la qualité technique ».

A propos du match de ce soir au Stade de France : « Je suis ravi que Quevilly se soit qualifié. Ils doivent jouer comme ils savent le faire. C’est la meilleures chance qu’ils ont de s’imposer ».

Même soutien de la part de Johnny Ecker, natif de Rouen, et qui a « trois potes qui jouent dans l’équipe de Quevilly », et qui était même venu les encourager en demi-finale, au stade d’Ornano à Caen, face à Rennes.

Le parallèle entre l’épopée nîmoise vécue en 1996 et aujourd’hui celle que traverse l’équipe Normande semble évidente pour l’ex-défenseur du Nîmes Olympique, de Marseille et du LOSC : « comme pour nous, c’est une bande de potes insouciants, qui ont tout à gagner, rien à perdre ». L’ancien Crocos ajoute l’esprit guerrier dont les nîmois avaient aussi fait preuve dans leur parcours, face à Saint-Etienne, Toulouse et Montpellier (en demi-finale), un parcours similaire où il fallait « sortir des gros » également, comme Quevilly cette année. Comme pour son coéquipier de l’époque Omar Belbey, Ecker n’a pas oublié les propos de Louis Nicollin et le fait que les Nîmois s’étaient « faits allumés » (par voie de presse notamment) avant le match.« Ils se croyaient déjà en finale ». Autre souvenir marquant pour le natif de Rouen : « les prolongations en quart de finale, face à Strasbourg (finalement remporté 3 à 2 par les gardois). Et, lorsque tout a commencé pour les Nîmois : « Face à Lunel, alors que l’on perd 2 à 1, à la 92eminute… Et que Dalmao égalise 2-2. Un match fou ! L’âme des Nîmois, l’esprit guerrier, c’est ça ». Johnny Ecker a l’expérience de jouer avec les grosses équipes comme les clubs moins huppés : « Je sais ce que c’est de l’autre côté avec Marseille. Et, si je devais donner un conseil aux joueurs de Quevilly : vivre l’essentiel pour ne garder que le meilleur par la suite. Prendre du plaisir. De toutes les façons, ils ont déjà gagné. Mais le foot, vous savez, est fait d’imprévus ». 

Omar Belbey, le buteur de la finale, parle d’abord « du plaisir qu’on avait pris à jouer ensemble, une bande de potes. Et quand on parle de primes de match… Ce n’était pas pour 3.800 Francs de l’époque que l’on se battait ». Quand on évoque Quevilly : « C’est rigolo, parce que l’on a un peu le même parcours, avec pour nous, en 16e de finale, une victoire face à Saint-Etienne (3-1) où l’on marque au début par Sabin, et puis on s’arrache. Ensuite, contre Montpellier en demi, je me souviens que Louis Nicollin avait envoyé la braise… Et avait annoncé que si ses joueurs perdaient, il ferait le retour à cheval. Son équipe étaient tombée sur un vrai guet-apens. Du coup il avait dit que ce qui le faisait le plus chier… c’est qu’on allait lui en parler pendant 40 ans ».

Sur l’éventuel ras-le-bol que suscitent ces souvenirs, Omar, souligne « qu’il n’y a pas un jours sans que l’on me rappelle la finale de 1996, et le fait que je suis le buteur. Pourtant, j’ai une carrière d’une quinzaine d’années de joueur. C’est dingue de voir qu’une image marque à vie à ce point. Moi je continue à vivre normalement. Si on ne me le rappelait pas cet épisode, j’oublierais », dit-il. Pourtant, le buteur d’un certain 4 mai 1996 au Parc des Princes a conservé des souvenirs précis de cette journée : « je me souviens qu’on avait arrosé la pelouse du Parc des Princes et que je n’avais pas de crampons vissés. C’est Dalmao, qui était en tribune qui m’a prêté ses chaussures. Et c’est avec celles-là que j’ai marquées. Au moment du but, c’était étrange, parce que je me suis retrouvé dans les 18 mètres, une position peu commune pour moi, un milieu défensif, mais j’avais suivie l’action menée par Nicolas Marx et Aber Ramdane. Après leur une-deux, je frappe et j’entends le public, puis le ballon rentrer dans le but, avant de suivre Abder des yeux partir au poteau de corner. Je vais alors le congratuler, comme si c’était lui qui avait marqué, comme de coutume. Une action je ne n’aurais pu refaire par la suite. Mais peu importe qui avait marqué. Personne n’imaginait qu’on marquerait et que l’on tiendrait une heure. On termine explosés.

Omar Belbey revient ensuite sur le parallèle avec Quevilly, et l’éventuel échec pour l’équipe de Brouard : « Ils ont un entraineur extraordinaire capable de les faire gagner. Je le connais bien, j’ai joué avec lui et contre lui. Si c’était moi, je mettrais une pièce sur Quevilly. Les joueurs vont être doublement motivés, comme dix-huit morts de faim ». 

Abder Ramdane, (l’ancien attaquant Nîmois, aujourd’hui en Allemagne) et qui a gardé des contacts réguliers avec les autres joueurs, comme J. Ecker, Cyril Jeunechamp, et revoit notamment Omar Belbey, lorsqu’il est de passage dans la région, se souvient de certaines sensations, dans la même tonalité que celles ressenties par le défenseur passé par Marseille : « l’entrée au Parc des Princes avec les supporters et toutes les couleurs Rouges dans les tribunes. Je me suis demandé : « mais où on est là ? ». Autant je n’ai pu avoir de souvenir du match de Montpellier à cause d’une blessure qui m’a contraint à sortir à la mi-temps, là j’ai encore les sensations en mémoire, la petite peur au ventre, la peur de prendre une rouste. Mais, le plus important c’est la causerie d’avant-match. Et pour Quevilly, par exemple, il faut leur rappeler que tout peut arriver, sans être arrogant, après les victoires face à Marseille, Rennes… »

Revenant sur sa propre aventure : « Pour nous, en 1996, le seul problème, c’est qu’il y avait Guy Roux, et qu’il avait bien tenu ses troupes. Mais, je pense que sur notre parcours, les entraineurs et les joueurs nous avaient pris un peu de haut ».

Le conseil du jeune et non moins expérimenté entraineur ; l’essentiel pour Quevilly : « c’est vraiment de croire en ses chances à fonds, et pas seulement de penser qu’ils sont invités à une fête ». Abder Ramdane souligne que la pression « est sur les épaules de tout le monde », mais en particulier sur les lyonnais, qui restent sur plusieurs défaites. Toutefois, « si Lyon joue à 100%, il ne devraient pas avoir de problème », conclut Abder Ramdane.

Mais que sont devenus nos héros de 1996 ?

Pierre Barlaguet, l’ex-entraineur du groupe pro du Nîmes Olympique entre 1982 et 1984, 1990-1991, 1994-1996 (mais aussi joueur entre 1950 et 1964) est aujourd’hui retraité, installé dans le Gard, du côté de Boucoiran, avec sa femme. Et il suit toujours avec attention les résultats du Nîmes Olympique.

Abder Ramdane (ancien attaquant Croco, 1993-96 et 1997-98) est installé en Allemagne depuis 14 ans, où il a terminé sa carrière de joueur pro au SC Fribourg, à cause d’une blessure à une rotule. C’est ensuite qu’il y entame brillement sa jeune carrière d’entraineur, après avoir passé tous ses diplômes – « UEFA Pro » en Allemagne. Il a déjà occupé plusieurs postes d’entraineur-adjoint dans de grands clubs de foot allemand : après un avoir coaché les – de 19 ans du Borussia  Mönchengladbach (entre 2005 et 2007), un passage en Grèce, à Panionios (entre 2007 et 2009), A. Ramdane se retrouve sur le banc du Munich 1860, aux côtés notamment de Lienen (entre 2009 et 2010), avant de faire un court passage à l’Arminia Bielefeld entre 2010 et 2011. L’ex-joueur nîmois est libre depuis peu. Alors pourquoi pas de retour en France et pourquoi à Nîmes sur le banc un de ces jours…

Johnny Ecker (ancien défenseur du Nîmes Olympique, entre 1993 et 1999, et 2006 et 2008, après un passage à Lille et à Marseille, avec lequel il atteint la finale de la coupe UEFA en 2004) a mis fin à sa carrière de joueur définitivement l’année dernière (à un niveau amateur). Il s’occupe désormais pleinement  de l’encadrement des jeunes du Stade Beaucairois 30 (où il a débuté avant d’intégrer le centre de formation du Nîmes Olympique). Il est d’ailleurs responsable du tournoi du Stade Beaucairois qui réunira les clubs de jeunes de l’O.M., de Montpellier, du Nîmes Olympiques etc. les 26 et 27 mai prochains. Titulaire du brevet d’Etat, lui aussi peut entraîner, même s’il n’a actuellement pas l’ambition d’entraîner un club pro du niveau d’Abder Ramdane, dont Johnny rappelle que « peu d’entraîneur en France ont tous les diplômes qu’Abder a passé ».

Omar Belbey (ancien milieu du Nîmes Olympique, buteur de la finale de 1996), entraine aujourd’hui le club amateur du SC ZUP Nord (« ZN ») de Nîmes depuis un an (son brevet d’Etat – BEF en poche depuis 2006). Après avoir arrêté sa carrière de joueur au club de Lunel en 2008, il a d’abord repris une activité professionnelle dans le privé avec un ami qui avait créé son entreprise. Rappelons que l’ancien international algérien (20 sélections) participe en 2001 à la montée en Division 1 de Montpellier (club pour lequel il joue entre 2000 et 2002).

Anecdotes d’Omar Belbey : Formé au FC Rouen, qui est mis en liquidation judiciaire en juin 1995, Omar se retrouve au chômage avant de signer finalement un mois après à Nîmes. Il raconte : « 10 mois après, je marque en finale face à Auxerre ».

Par ailleurs, celui qui se retrouve seul à l’internat, au centre de préformation rouennais, dès l’âge de 12 ans, avant de signer son premier contrat pro à 17 ans, raconte qu’il a habitait à Petit Quevilly (ville du club finaliste ce samedi), et qu’en poussin, de l’âge de 8 à 10 ans, il a joué avec Johnny Ecker (lui-même né à Rouen en 1973) au C.O. Cléon. Qui aurait pu imaginer que ces deux-là se retrouveraient dix ans après en finale de coupe de France… ? Après tout, c’est aussi cela le sport.

 

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Stanislas Golinski
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Stanilas Golinski quand il avait 80 ans, toujours fidèle à Nîmes
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